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La Bibliothèque critique de Richard Simon

Bibliotheque critique, ou Recüeil de diverses pieces critiques, dont la plûpart ne sont point imprimées, ou ne se trouvent que très-difficilement, publiées par Mr. de Sainjore qui y a ajouté quelques notes.
Paris-Amsterdam : Jean Louis de Lormes, 1708-1710. - 4 vol. 

Par Richard Simon, avec la collaboration de Nicolas Barat.


[Voir la notice dans le catalogue]


    Richard Simon naît à Dieppe le 13 mai 1638. Il étudie la philosophie, le grec, l'arabe ; durant sa formation en théologie, il s'initie aux langues hébraïque et syriaque ; après une période de doute, il se décide à rentrer à l'Oratoire en 1662, où il est ordonné prêtre le 20 septembre 1670. Il est exclu de l'ordre en 1678, suite à la condamnation de son Histoire critique du Vieux Testament par le Conseil d'État.
   Il est considéré « comme l'un des pères de l'exégèse critique moderne », étant le premier à associer le mot « critique » à celui d' « histoire ». Dans ses écrits polémiques les plus célèbres, il doute que Moïse soit l'auteur unique du Pentateuque. Selon lui, les croyances religieuses et leurs pratiques ne tendent pas vers le progrès mais vers la décadence ; hostile au jansénisme, il se sent proche de la doctrine moliniste. Il divise autant qu'il attire l'admiration, déchaînant les passions dans les cercles d'érudits .
   Il meurt à Dieppe le 20 mars 1712, léguant à la bibliothèque du chapitre de Notre-Dame de Rouen ses livres et manuscrits (une partie ayant été détruite lors des bombardements de Dieppe par la flotte anglo-hollandaise le 22 juillet 1694).  


   Dans les quatre volumes de la Bibliothèque critique, Richard Simon propose une analyse critique des extraits de pièces ou de livres traitant de la religion et devenus rares : Écriture Sainte, livres apocryphes, ouvrages des Pères et Docteurs de l'Église, bibliothèques rabbinique, ecclésiastique, dogmes, histoire de l'Église, etc. Le contenu est présenté dans l'avertissement au lecteur (vol. I, p. [3] et [4]).
      L'auteur signe « Mr. De Sainjore » (au titre des 4 volumes), par souci d'anonymat ou suivant l'usage de l'époque qui était d'écrire sous plusieurs noms : on trouve ainsi les initiales « R. S. P. », et les pseudonymes « Don Recared Scimeon », « le sieur de Simonville » (Journal de Trévoux, cité dans Sgard). Il est cependant attesté que son élève et ami Nicolas Barat (165.-1706) a également participé à l'écriture de certains passages.
     Le polémiste peut compter sur des soutiens fidèles tel Frémont d'Ablancourt, Henri Justel et des amis Oratoriens. Mais ses détracteurs sont pléthore : Bossuet, Arnauld et Port-Royal, Jean Le Clerc, Toinard, Vossius, Jurieu, Michel Le Vassor, Spanheim, sans compter les ordres religieux, etc. Dans la table des chapitres du vol. III, on voit ainsi Richard Simon attaquer vertement son ennemi Pierre-Valentin Faydit (1644-1709), un ancien compagnon de l'Oratoire, qu'il traite de "pitoyable controversiste".

    La Bibliothèque critique est victime de la censure et condamnée au pilon par un arrêt du Conseil d'État le 5 août 1710, sur dénonciation de Renaudot. Mais l'ouvrage interdit survit, étant « presque en même temps réimprimé à Verdun » (Journal de Verdun, cité dans Sgard). Par ailleurs, il connaîtra une suite, sous l'impulsion de Nicolas Barat : Nouvelle bibliothèque choisie où l'on fait connaître les bons livres en divers, genres de littérature, et l'usage qu'on doit en faire, parue en 1714 après la mort des deux collaborateurs.

     En 1678, l'Histoire critique du Vieux Testament avait déjà été censurée par décision du Conseil d'État, sous les pressions du chancelier Michel Le Tellier et de Bossuet ; la plupart des 1300 exemplaires avaient été détruits. [cote ENS :T E e 15 4° : 5e édition, A Rotterdam, chez Reinier Leers, 1685].

Bibliographie : Dictionnaire des journaux, 1600-1789, sous la dir. de Jean Sgard, Paris : Universitas, 1991, pp. 178-179. - A. Guillaumont, P. Auvray,  « Richard Simon (1638-1712) », in Revue de l'histoire des religions, 1976, vol. 190, n° 2, pp. 215-216. - Jean-Louis Ska, « Richard Simon : un pionnier sur les sentiers de la tradition », in Recherches de science religieuse 2/2009 (Tome 97), p. 307-316. - Jean-Pierre Massaut, « Simon (Richard). Additions aux Recherches curieuses sur la diversité des langues et religions », in Revue belge de philologie et d'histoire, 1988, vol. 66, n° 4, pp. 914-915. - Emile Poulat, Patric Ranson, « Richard Simon, ou du caractère illégitime de l'augustinisme en théologie », in Archives des sciences sociales des religions, 1991, vol. 74, n° 1, pp. 283-284.

Notre exemplaire : L H cr 94 12°
- La Bibliothèque ne possède pas le quatrième volume. Reliure des vol. 1-2 : 18e s., parchemin, dos long avec titre manuscrit, tranches mouchetées de bleu, gardes de papier marbré. Reliure du vol. 3 : couvrure refaite, dos à cinq nerfs, tranches mouchetées de rouge. 
Cachet "Ecole normale. Université de France". 
Restauré en 2010.

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